Au Kremlin, Bamako et Moscou jettent les bases d’une coopération stratégique dans l’atome civil
Lundi 24 juin 2025, Moscou. Dans le faste discret du Kremlin, le président malien Assimi Goïta et son homologue russe Vladimir Poutine
ont fait bien plus qu’échanger des poignées de main. Ils ont signé un partenariat symbolique et lourd de sens : un accord sur le nucléaire civil.
Ce geste, court mais décisif, a marqué un tournant énergétique pour le Mali. Un pays enclavé, miné par l’insécurité, mais en quête de souveraineté technologique.
Un pacte pour l’avenir énergétique du Mali
« L’atome n’est pas une menace. C’est une chance. Une chance maîtrisée, partagée, sécurisée », a déclaré un membre de la délégation malienne, en marge de la cérémonie.
Pourquoi le nucléaire ? Pourquoi maintenant ?
Le Mali, confronté à une demande énergétique croissante, voit dans l’énergie nucléaire une solution durable, stable, et décarbonée. Cet accord sur le nucléaire civil intervient alors que le pays dépend fortement des énergies fossiles et de l’hydraulique, souvent mises à mal par la sécheresse ou les attaques contre les infrastructures.
En se tournant vers Moscou, Bamako parie sur un transfert de compétences et de technologies, loin des circuits classiques dominés par l’Occident.
La Russie, une puissance nucléaire en quête de relais africains
Pour Moscou, cet accord s’inscrit dans une stratégie plus large : renforcer sa présence technologique et diplomatique sur le continent africain. Depuis plusieurs années, Rosatom, le géant russe du nucléaire, multiplie les accords de coopération avec des pays comme l’Égypte, le Rwanda ou encore le Soudan. Le Mali devient ainsi le dernier maillon d’une chaîne d’alliance énergétique alternative, à rebours des anciens partenariats historiques.
Une signature dans la continuité d’un rapprochement assumé
Cet accord vient couronner une visite officielle dense, où les deux chefs d’État ont discuté sécurité, santé, éducation, infrastructures… et désormais énergie.
« Notre coopération est globale. Elle s’étend à tous les domaines utiles au développement du Mali », a résumé Assimi Goïta après la signature.
Il ne s’agit pas seulement d’électricité ou de réacteurs. C’est une vision partagée de la souveraineté technologique et de la maîtrise des ressources.
Entre promesse de progrès et défis concrets
Si l’annonce a fait sensation à Bamako, les défis restent nombreux. Le nucléaire civil exige des normes strictes, des contrôles indépendants,
et une infrastructure humaine et juridique robuste. Le gouvernement malien entend s’appuyer sur l’expertise russe pour former des cadres, des ingénieurs, des régulateurs. Un programme de bourses et de stages est annoncé. Des échanges entre les universités maliennes et russes devraient débuter dès 2026.
Réactions mitigées à Bamako
L’accord a suscité des réactions contrastées au sein de l’opinion publique. Certains y voient une avancée stratégique majeure,
d’autres s’inquiètent des risques liés à la sécurité, à la transparence, ou encore à la dépendance technologique vis-à-vis d’un seul partenaire.
« Le nucléaire est un outil. Tout dépend de ce qu’on en fait. Nous attendons des garanties », a déclaré une chercheuse malienne en énergies renouvelables.
Vers un chantier du siècle ?
À ce stade, aucun site de construction n’a été annoncé. Mais le ministre malien de l’Énergie évoque une première phase expérimentale, avec un petit réacteur de recherche, probablement dans la région de Koulikoro ou Ségou. Ce serait le tout premier projet nucléaire jamais envisagé au Mali. Un projet à haut risque, mais à fort potentiel, selon les autorités.
Une vision énergétique en rupture avec le passé
Depuis 2022, le gouvernement de transition affiche une volonté forte de diversifier ses partenaires, de réduire sa dépendance aux bailleurs occidentaux,
et de miser sur les ressources nationales et les transferts directs de technologies. Ce choix du nucléaire civil, avec la Russie, s’inscrit dans cette dynamique.
C’est un pari de rupture. Un pari sur le temps long.
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